La Bérénice anglaise de Thomas Otway, ou Racine sans Aristote
L’article propose une relecture originale de l’adaptation anglaise de la Bérénice de Racine par Thomas Otway : Titus and Berenice (1677). Il en fait émerger la principale nouveauté, peu explorée par la critique et pourtant décisive pour en expliquer le décalage par rapport au texte racinien : le rôl...
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Published in | Etudes epistémè |
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Format | Journal Article |
Language | French |
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Association Études Épistémè
11.11.2021
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Summary: | L’article propose une relecture originale de l’adaptation anglaise de la Bérénice de Racine par Thomas Otway : Titus and Berenice (1677). Il en fait émerger la principale nouveauté, peu explorée par la critique et pourtant décisive pour en expliquer le décalage par rapport au texte racinien : le rôle attribué au personnage d’Antiochus. Dans un dialogue fructueux entre modèle et imitation, la « traduction » britannique se présente ainsi comme le révélateur capable de rendre visible, par contraste, l’image latente du texte racinien, d’en dévoiler le secret susceptible de transformer un « tissu élégant de Madrigaux et d’Élégies » en véritable tragédie aristotélicienne. Chez Racine, alors que l’histoire de Titus et Bérénice n’avait aucune caractérisation tragique et se configurait paradoxalement comme une longue et galante déclaration d’amour constamment reportée, le roi de Comagène – véritable héros tragique – permettait de réintroduire une progression tragique dans l’intrigue. Méprisant, comme son contemporain Villars, l’importance du personnage, Otway choisit de le dégrader au rôle de rival amoureux, inutile au déroulement de l’action, et se trouve donc obligé d’animer sa pièce d’une autre manière afin d’en accroître le pathétique et les rebondissements. C’est ainsi que s’explique son choix de déformer radicalement – malgré les apparentes reprises textuelles – la caractérisation des personnages de Titus et de Bérénice, et d’exacerber l’effet destructeur et déstabilisateur de la passion amoureuse, au point de donner l’illusion d’avoir écrit une pièce plus racinienne que celle de Racine. |
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ISSN: | 1634-0450 |
DOI: | 10.4000/episteme.13229 |