L’homme obscur et l’esprit du jeu vidéo

L’un des premiers philosophes du cinéma, Béla Balázs, fonde son éloge sur une caractéristique esthétique de l’image cinématographique, rendue possible par la technique de la projection d’images animées : on y découvre d’immenses visages dévoilant nouvellement dans leurs mouvements expressifs la vie...

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Published inAppareil no. 26
Main Author Crevoisier, Michaël
Format Journal Article
LanguageFrench
Published MSH Paris Nord 01.12.2023
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Summary:L’un des premiers philosophes du cinéma, Béla Balázs, fonde son éloge sur une caractéristique esthétique de l’image cinématographique, rendue possible par la technique de la projection d’images animées : on y découvre d’immenses visages dévoilant nouvellement dans leurs mouvements expressifs la vie de l’esprit. Sur l’écran apparaît l’âme humaine dans une clarté que nous pensions impossible, une nouvelle visibilité de l’homme. Qu’en est-il aujourd’hui avec ce nouveau type d’images que proposent les jeux vidéo ? Si les jeux vidéo sont cette pratique esthétique correspondant au stade numérique de l’évolution des techniques, pouvons-nous en attendre autant pour la réflexion philosophique que ce que le cinéma apporta au vingtième siècle ? L’hypothèse que cet article entend élaborer a pour but de chercher à penser les jeux vidéo en tant que leur pratique consiste en une relation homme-machine non utilitaire dont la finalité esthétique implique la perception de cette relation. À partir de l’analyse simondonienne de ce type de relation, nous cherchons à défendre l’idée selon laquelle dans certains jeux vidéo, l’usage « mineur » de l’objet technique (c’est-à-dire automatisé) que nécessite la manipulation de l’image, implique un type d’interaction dans laquelle les schèmes de fonctionnement de l’esprit humain et ceux de la machine apparaissent indiscernables. La description de telles interactions dans des séquences de jeu, nous montre que cette indiscernabilité ressentie révèle esthétiquement une obscurité de l’homme non pas en opposition mais au-dedans de sa visibilité. Ainsi, nous défendons que l’apport esthétique des jeux vidéo consiste à nous donner à percevoir la réalité humaine en tant qu’elle n’est pas isolable dans l’intériorité d’une âme, mais relationnelle, c’est-à-dire se manifestant dans l’obscurité de la relation homme-machine.
ISSN:2101-0714
2101-0714
DOI:10.4000/appareil.7053