Évaluation de la pertinence des antibiothérapies prescrites aux migrants primo-arrivants en situation de précarité

Des données contradictoires suggèrent un risque plus important de portage de bactéries multirésistantes chez les personnes migrantes en lien avec les prévalences dans les pays d’origine. Une surexposition aux antibiotiques pourrait amplifier ce phénomène et exposer à un risque plus élevé de portage,...

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Published inMédecine et maladies infectieuses Vol. 50; no. 6; p. S52
Main Authors Vignier, N., Kpossou, K., Bouffard, A., Duffo, C., Delaunay, M., Sohbi, I., Binard, M., De pontfarcy, A., Diamantis, S.
Format Journal Article
LanguageFrench
Published Elsevier Masson SAS 01.09.2020
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Summary:Des données contradictoires suggèrent un risque plus important de portage de bactéries multirésistantes chez les personnes migrantes en lien avec les prévalences dans les pays d’origine. Une surexposition aux antibiotiques pourrait amplifier ce phénomène et exposer à un risque plus élevé de portage, de transmission et d’infection à bactéries multirésistantes. Tous les dossiers de consultation de soins primaires d’une Permanence d’accès aux soins de santé ambulatoire ont été revus par un infectiologue de 2017 à début 2020. La fréquence des maladies infectieuses a fait l’objet d’un recensement systématique. Toutes les prescriptions d’antibiotiques ont été analysées au vu des éléments du dossier médical et des dernières recommandations en vigueur en France. De 2017 à 2019, une moyenne de 627 patients ont consulté annuellement à la PASS ambulatoire pour 851 consultations annuelles ; 93 % étaient originaires de pays tiers dont 61 % d’Afrique subsaharienne. Les maladies infectieuses représentaient le premier motif de consultation (163/851, 19 %) dont 84/163 (52 %) pour une infection virale aiguë et 50/163 (31 %) pour une infection bactérienne aiguë. Sur les 3 ans, 119 consultations ont fait l’objet d’une prescription d’antibiotique pour des hommes (64 %), âgés en moyenne de 30 ans dont 11 % d’enfant de moins de 10 ans et 13 % de personnes âgées de 65 ans et plus. Les antibiothérapies ont été jugées comme indiquées dans 45 % (54/119) des cas seulement. Pour les patients dont l’antibiothérapie a été jugée comme indiquée, dans un cas sur trois (18/54) la molécule utilisée était inadéquate ; dans 28 % des cas (15/54) la posologie était inadaptée ; et dans 43 % (23/53) des cas la durée de prescription était inadéquate. Les antibiothérapies jugées comme non indiquées concernaient le plus souvent des douleurs dentaires sans abcès visible, une carie ou une gingivite (19/65, 29 %), un tableau de bronchite ou un syndrome grippal (17/65, 26 %), des infections des voies aériennes supérieures d’allure virale (15/65, 23 %), une décompensation d’asthme ou de BPCO dans un contexte viral (4), des brûlures urinaires, douleurs pelviennes ou lombalgie sans BU réalisée ou avec BU négative (4), un impétigo non grave (3), une colonisation urinaire chez une patiente asymptomatique (1), une suspicion de salpingite sans examen gynécologique ni adressage (1), un épistaxis sur rhinite croûteuse (1), un ongle incarné (1), un sycosis de la barbe non compliqué (1), une prescription d’acide fusidique sur une ulcération génitale (1). Les prescriptions d’antibiotiques aux migrants primo-arrivants sont non justifiées dans près d’un cas sur deux et quand elles le sont des erreurs de spectre, posologie et durée sont fréquentes. Ces résultats devront être vérifiés à une échelle multicentrique mais sont préoccupants puisque qu’ils traduisent une pression de sélection chez une population déjà à risque.
ISSN:0399-077X
1769-6690
DOI:10.1016/j.medmal.2020.06.097