Aptitude militaire et médecine interne : une étude rétrospective

La détermination de l’aptitude à exercer le métier de militaire poursuit 2 buts : d’une part, empêcher que la réussite d’une mission ne soit hypothéquée pour une raison de santé et, d’autre part, protéger les soldats d’éventuelles séquelles qui pourraient survenir sur un théâtre d’opérations extérie...

Full description

Saved in:
Bibliographic Details
Published inLa revue de medecine interne Vol. 43; pp. A229 - A230
Main Authors Lhaiba, M., Caré, W., Vanquaethem, H., Mestiri, R., Cassouret, G., Chaara, T., Le Burel, S., Nielly, H.
Format Journal Article
LanguageFrench
Published Elsevier Masson SAS 01.06.2022
Online AccessGet full text

Cover

Loading…
More Information
Summary:La détermination de l’aptitude à exercer le métier de militaire poursuit 2 buts : d’une part, empêcher que la réussite d’une mission ne soit hypothéquée pour une raison de santé et, d’autre part, protéger les soldats d’éventuelles séquelles qui pourraient survenir sur un théâtre d’opérations extérieures (OPEX) comme, par exemple, l’opération Barkhane en bande Saharo-Sahélienne. En effet, les militaires projetés en OPEX sont souvent en environnement isolé, en zone tropicale, avec de longues durées d’évacuation. Dans le Service de santé des armées, les visites d’aptitude initiale pour les candidats à l’engagement, et les visites médicales périodiques en cours de carrière, sont réalisées par les médecins généralistes militaires. En cas de besoin, ces derniers peuvent avoir recours à un avis spécialisé [1]. Nous avons réalisé une étude observationnelle rétrospective monocentrique des décisions d’aptitude référées en médecine interne. Tous les dossiers de patients adressés en médecine interne pour une décision d’aptitude entre septembre 2019 et décembre 2020 ont été colligés. Étaient inclus les patients civils adressés pour avis d’aptitude à l’engagement et les patients militaires adressés pour avis d’aptitude en cours de carrière, que les dossiers soient examinés sur pièces ou que les patients soient vus en consultation en présentiel. Quarante et un dossiers d’aptitude ont été identifiés, 23 examinés sur pièces et 18 ayant fait l’objet d’une consultation en présentiel. Ils concernaient 31 hommes et 10 femmes, d’âge moyen 31 ans. Les principales pathologies impliquées étaient des maladies auto-immunes ou systémiques (n=10), des anomalies congénitales du métabolisme (n=6), des causes de thrombophilie (n=5), des causes congénitales ou acquises de malformation ou d’insuffisance d’organe (n=5), des néphropathies (n=5), et des anomalies de l’hémogramme (n=3). Quatre patients étaient traités par immunosuppresseurs, 3 par biothérapies et 4 par anticoagulants à posologie curative. Toutes les décisions d’aptitude étaient collégiales. Parmi les 15 candidats civils adressés pour aptitude à l’engagement, 6 était déclaré aptes. Ils présentaient un antécédent d’arthrite juvénile avec uvéite intermédiaire sans poussée depuis 7 ans et sans traitement depuis 5 ans, un syndrome de Mayer-Rokitansky-Küster-Hauser de type 2 avec ectopie rénale, un rein unique fonctionnel avec hypertension artérielle, une protéinurie isolée, une protéinurie avec une hématurie microscopique, et un fibrolipome musculaire avec un antécédent d’intervention chirurgicale pour malformation vasculaire jugulocarotidienne. Les 7 candidats déclarés inaptes présentaient un antécédent de thrombose veineuse profonde avec mutation V Leiden hétérozygote, une pelade universelle, un lupus systémique avec atteinte cutanéo-articulaire, un acrosyndrome touchant tous les doigts chez un homme, une myopathie génétique, une maladie de Cushing avec syndrome de Beckwith-Wiedemann, et une phénylcétonurie. Pour les 2 candidats restant, des examens complémentaires étaient demandés. Parmi les 26 militaires adressés, l’enjeu prédominant était l’aptitude aux OPEX. Deux militaires sur les 9 adressés pour aptitude aux OPEX étaient déclarés aptes. Ils présentaient un antécédent unique de TVP du mollet post-chirurgicale, et une gammapathie monoclonale de signification rénale sans rechute ni traitement depuis 8 ans. Quatre militaires étaient déclarés aptes pour l’outre-mer uniquement dans des territoires non isolés et bénéficiant de structures sanitaires comparables à la France métropolitaine (comme par exemple La Réunion). Ils présentaient une néphropathie à IgA traitée par inhibiteur de l’enzyme de conversion, un déficit en mévalonate kinase traité par anakinra, un purpura thrombopénique immunologique chronique, et un antécédent d’infarctus rénal unilatéral partiel en lien avec une dissection de l’artère rénale. Un militaire était déclaré inapte aux OPEX. Il présentait une uvéite antérieure non granulomateuse synéchiante récidivante. Pour les 2 militaires restant, des examens complémentaires étaient demandés. Les autres militaires étaient adressés pour aptitude au service en cours de carrière (n=6), décision de congé de longue durée pour maladie (n=2), et précision médico-administrative au sujet de l’aptitude (n=9). Les recours spécialisés d’aptitude adressés à l’interniste militaire recouvrent des pathologies très variées. L’interniste militaire doit allier polyvalence, connaissances spécialisées, pragmatisme, connaissance du milieu opérationnel et esprit de collégialité, afin que les décisions d’aptitude soient déterminées de manière juste.
ISSN:0248-8663
1768-3122
DOI:10.1016/j.revmed.2022.03.185