La réponse institutionnelle à l’anorexie mentale

À travers cet article, nous interrogeons la pertinence des réponses institutionnelles et ses implicites théoriques dans la prise en charge des patients souffrant d’anorexie mentale. Nous démontrons l’intérêt de penser un cadre de soins s’appuyant sur la théorie psychanalytique dans un contexte où la...

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Published inEvolution psychiatrique Vol. 85; no. 3; pp. 365 - 374
Main Author Guéguen, Jean-Philippe
Format Journal Article
LanguageFrench
Published Elsevier Masson SAS 01.08.2020
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Summary:À travers cet article, nous interrogeons la pertinence des réponses institutionnelles et ses implicites théoriques dans la prise en charge des patients souffrant d’anorexie mentale. Nous démontrons l’intérêt de penser un cadre de soins s’appuyant sur la théorie psychanalytique dans un contexte où la sauvegarde narcissique passe par un enjeu centré sur le corps. Nous nous appuyons sur notre expérience clinique en milieu hospitalier dans un service de psychiatrie pour adolescents jeunes adultes. Nous partons de la question du corps qui est au centre de cette pathologie. Face à un corps qui est monstration, qui a perdu tout effet de contenance et est un enjeu de survie psychique, nous interrogeons les différentes formes que peut prendre la réponse institutionnelle : rôle pare-excitant, rôle de contenance, rôle de différenciation entre le « dedans » et le « dehors ». Ces réponses institutionnelles sont évoquées en s’appuyant sur la théorie analytique en tentant de penser la relation d’objet vécue par ces patients comme jamais satisfaisante. Nous constatons l’importance de définir un cadre de soins qui soit différent de la notion de « contrat ». Cadre de soins qui doit être parlé avec le patient en lui laissant le temps de se l’approprier. Nous insistons sur le travail institutionnel et la notion de transfert institutionnel pour que les équipes puissent supporter la destructivité de ces patients, sans se sentir elles-mêmes détruites. Un exemple clinique souligne l’importance pour les patients de retrouver une forme d’auto-érotisme quand ils se retrouvent seuls face à eux-mêmes. La séparation du milieu environnemental est souvent critiquée dans la prise en charge de l’anorexie. Nous observons que la séparation permet à l’institution de jouer le rôle de moi auxiliaire dans un contexte où la relation d’objet est vécue comme insuffisante et/ou trop intrusive. Il est important pour une institution de définir ses implicites théoriques, en particulier dans la prise en charge des pathologies de l’adolescence. L’approche psychanalytique permet de mieux comprendre la destructivité et les enjeux de survie psychique. Elle est un outil précieux pour aborder la relation au patient et pour l’aider à sortir de son chaos interne. Through this article, we question the relevance of institutional responses and their implicit theories in the care of patients with anorexia nervosa. We demonstrate the interest of thinking about a care framework based on psychoanalytic theory in a context where the safeguarding of subjects’ narcissism is often centered on the body. We draw on our clinical experience in a psychiatric hospital for adolescents and young adults. We start from the question of the body, which is at the center of this pathology. Faced with a body—a body on display, a body that has lost its capacities for containment, and that is a site where psychic survival is at stake—, we question the different forms that the institutional response can take : a protective shield role, a role of containment, a role of differentiation between “inside” and “outside.” These institutional responses are evoked by relying on analytical theory, while trying to think through the object relationship—experienced by these patients as never satisfactory. We see the importance of defining a framework of care that is different from the concept of the “contract.” A framework of care that should be discussed with the patient, giving them time to take ownership. We insist on the institutional work and the notion of institutional transfer so that the teams can manage these patients’ destructiveness, without feeling as if they themselves are destroyed. A clinical example emphasizes the importance for patients to find a form of autoeroticism when they are alone with themselves. Separation from the environment is often criticized in the management of anorexia. We observe that separation allows the institution to play the role of auxiliary self in a context where the object relationship is experienced as insufficient and/or intrusive. It is important for an institution to define its implicit theoretical approach, in particular in the management of adolescent pathologies. The psychoanalytic approach allows us to better understand destructiveness and the issues of psychic survival. It is a precious tool in constructing a relationship with the patient and in helping her/him out of her/his internal chaos.
ISSN:0014-3855
1769-6674
DOI:10.1016/j.evopsy.2020.03.005